En 2020, ce potentiel de chaleur fatale récupérable se situait aux alentours de 1 TWh, soit l’équivalent de 100 000 logements. Il pourrait atteindre 3,5 TWh en 2030 avec la croissance du nombre de data centers liés à l’augmentation des besoins et des activités numériques. La directive européenne sur l’efficacité énergétique rend obligatoire la valorisation de la chaleur fatale pour les data centers de plus de 1 MW.
Qu’est-ce que la « chaleur fatale » des DATACENTERS ?
La « chaleur fatale » des datacenters est la chaleur générée par les serveurs dans les datacenters et par les machines situées dans le datacenter lorsque celui-ci est en fonctionnement. Cette chaleur peut avoir un intérêt environnemental et économique.
Il est en effet possible de valoriser la chaleur en la réutilisant ou encore en la réinjectant dans le circuit de distribution énergétique. Cette action a deux effets :
- diminuer l’impact du datacenter sur l’environnement,
- devenir une nouvelle ressource énergétique, au même titre que le photovoltaïque, le charbon, le fioul… ou le nucléaire
Selon les estimations, la consommation électrique des data centers devrait représenter plus de 3% de la demande d’électricité de l’Union européenne à horizon 2030. Pour freiner la progression de leur consommation, le texte introduit des exigences nouvelles :
- Les data centers d’une puissance totale nominale supérieure à 1 MW seront dans l’obligation d’utiliser la chaleur fatale, sauf impossibilité technique ou économique. Une analyse coûts/avantages devra désormais être réalisée pour tout projet de nouvelle installation ou de rénovation substantielle. Les data centers devront se mettre en conformité avec ces obligations avant le 11 octobre 2025.
- Depuis le 15 mai 2024, les data centers d’une puissance supérieure à 500 kW devront mettre annuellement à disposition du public des informations relatives à leur performance énergétique (superficie au sol du data center, consommation d’énergie, puissance installée, utilisation de chaleur fatale…). L’ensemble de ces données sera compilé dans une base de données par la Commission européenne, qui sera tenue de présenter d’ici le 15 mai 2025 un rapport au Parlement européen et au Conseil relatif à l’établissement de normes minimales de performance, le cas échéant traduit sous forme de propositions législatives.
Pourquoi les data centers produisent-ils autant de chaleur fatale ?
Les centres de données regroupent un très grand nombre de serveurs et de dispositifs informatiques, qui tournent en continu pour assurer le stockage, le traitement et la circulation de l'information. Cette forte densité d’équipements, concentrés sur des surfaces parfois réduites, entraîne inévitablement une production massive de chaleur.
Afin d’éviter toute surchauffe susceptible de compromettre le bon fonctionnement des machines, des systèmes de refroidissement intensifs sont déployés : climatisation, ventilation, ou encore refroidissement naturel (free cooling). Ces dispositifs ont un coût énergétique important, puisqu’ils peuvent représenter jusqu’à 40 % de la consommation électrique totale d’un data center. Ironiquement, une grande partie de cette énergie est utilisée uniquement pour évacuer une chaleur que l'on pourrait valoriser.
Ce fonctionnement illustre un double gaspillage : d’un côté, une chaleur abondante est dissipée sans usage ; de l’autre, on consomme de l’électricité supplémentaire pour la faire disparaître. Pourtant, il serait possible de transformer ce "déchet thermique" en une ressource utile, par exemple en l’intégrant à des réseaux de chaleur urbains ou en chauffant des bâtiments à proximité.
Cela permettrait de réduire la demande énergétique globale des data centers tout en contribuant à la production de chaleur décarbonée. Une opportunité à la fois écologique et stratégique, qui va dans le sens d’une informatique plus responsable et résiliente.
Comment valoriser la chaleur des data centers ?
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Récupération de la chaleur au plus près des équipements : La première étape consiste à capter la chaleur générée par les serveurs et les unités de refroidissement à l’aide d’échangeurs thermiques placés à des endroits stratégiques du data center.
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Élévation de la température grâce à une pompe à chaleur : Comme la chaleur récupérée est souvent trop basse (entre 30 et 40?°C), elle doit être portée à une température plus élevée (environ 55 à 65?°C) pour être utilisable, notamment pour le chauffage. Cela se fait par une pompe à chaleur.
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Injection dans un réseau de chaleur urbain : Lorsqu’un réseau de chaleur est présent à proximité, la chaleur du data center peut y être injectée pour chauffer des logements, des bureaux ou d’autres bâtiments publics ou privés.
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Utilisations locales alternatives : En dehors des réseaux urbains, la chaleur peut aussi servir à des usages de proximité comme le chauffage de serres agricoles, de piscines, ou pour des procédés de séchage (boues, produits agricoles, etc.).
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Production d’électricité (dans certains cas) : Si la température récupérée est suffisamment élevée (au-delà de 80?°C), elle peut être transformée en électricité à l’aide d’un cycle de Rankine organique. Cette technologie reste toutefois complexe et onéreuse, donc encore marginale.
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Des aides financières pour soutenir les projets
Conscients de l’intérêt croissant pour la récupération de la chaleur fatale des data centers, les autorités publiques ont mis en place plusieurs dispositifs pour encourager et accompagner ces initiatives :
Le Fonds Chaleur de l’ADEME
Depuis 2015, ce fonds finance les projets de valorisation de chaleur fatale, y compris ceux des data centers, à condition que la chaleur soit utilisée en dehors du site. Entre 2015 et 2020, quatre projets ont bénéficié de ce soutien, représentant 94 GWh de chaleur valorisée et plus de 5 millions d’euros d’aides.
Les Certificats d’Économies d’Énergie (CEE)
Plusieurs fiches standardisées s'appliquent aux data centers. Par ailleurs, des opération spécifiques CEE peuvent aussi financer des opérations personnalisées.
Parmi les fiches applicables aux data centers, on trouve notamment :
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BAT-TH-156 : Mise en place d'un système de freecooling par eau de refroidissement en substitution d'un groupe de froid permettant de refroidir un réseau hydraulique de climatisation en utilisant l'air extérieur. Ce système doit assurer 100 % des besoins en froid lorsque la température extérieure est au moins 3°C inférieure à la température de consigne. Cette fiche subventionne 4,5 fois plus la climatisation d'un data center que la climatisation classique.
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BAT-TH-153 : Mise en place d'un système de confinement des allées froides et allées chaudes dans un data center, interne ou d'hébergement, neuf ou existant. Le confinement doit permettre de séparer simultanément les flux d'air chaud et froid par des parois rigides et étanches, avec une température de soufflage supérieure à 22°C.
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BAT-EQ-130 : Mise en place d'un système de condensation frigorifique permettant d'avoir une faible différence de température entre le fluide frigorigène et l'air extérieur. Le montant de la prime dépend du type de condenseur, du ΔT et de l'application (climatisation data center mieux rémunérée).
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BAT-TH-134 : Mise en place d'un système de régulation sur un groupe de production de froid permettant d'avoir une haute pression flottante, optimisant la consommation énergétique des ventilateurs du condenseur en fonction de la température extérieure.
La taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE)
Depuis 2021, un tarif réduit est accordé aux data centers qui mettent en œuvre des bonnes pratiques en matière d’efficacité énergétique et de valorisation de la chaleur fatale. Les critères détaillés doivent être définis par décret.
Pour prétendre à ces aides, les projets doivent répondre à certaines conditions techniques et économiques :
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Mener une étude de faisabilité préalable afin de bien caractériser la source de chaleur, les besoins potentiels et la solution envisagée.
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Garantir une température minimale de la chaleur récupérée, généralement au-dessus de 55?°C, pour une utilisation externe.
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Dimensionner correctement les équipements de captage en fonction des besoins identifiés.
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Respecter un délai de retour sur investissement souvent limité à 5 ans pour bénéficier des financements publics.